En avril 1971 sous le ministère d’Olivier Guichard en poste à l’Éducation depuis 1969. Olivier Giscard d’Estaing, le frère du futur Président de la République, se fait le rapporteur de la loi du 1er juin 1971 dite « Pompidou ». Cette dernière propose la pérennisation du contrat simple,
ce qui revient en fait à verrouiller la loi Debré.
Dans ce type de contrat, les enseignants payés par l’État sont cependant personnels de droit privé.
Olivier Giscard d’Estaing avait déjà énoncé cette proposition, dans un livre publié la même année : « Education et civilisation ». explicitement sous-titré « Pour une révolution libérale de l’enseignement ». Des thèses reprises et développées ultérieurement par le Club de l’Horloge et l’Union RPR-UMP pour la France dans son programme électoral de février 1993.
Analyse confirmée dans un colloque du Sénat le 4 février 2005, où le docteur en droit Jean Pierre Delannoy confirme : « le rapporteur de l’Assemblée nationale Monsieur Olivier Giscard d’Estaing, part du constat : si l’enseignement privé est, en France, largement confessionnel, c’est pure contingence historique. Par conséquent l’enjeu du débat sur l’enseignement privé est le développement d’une conception libérale de l’enseignement, ouvrant la voie à l’établissement de la concurrence entre privé et public : enjeu important, certes, mais où la considération religieuse est inexistante. »
Nicole Fontaine, en 1971, ne disait pas autre chose : « … On s’aperçoit que la liberté de l’enseignement change de fondement. De religieux, il devient idéologique. » Système âprement défendu, par l’Eglise catholique pour préserver une prétendue visibilité sociale.
Ce sous-titre du livre d’Olivier Giscard d’Estaing, « Pour une révolution libérale de l’enseignement », annonce son dessein qui consiste à appliquer à l’enseignement les thèses générales du libéralisme. « Ces propositions - écrit-il – sont inspirés par les principes de gestion d’organisation développés par l’auteur dans La décentralisation des pouvoirs dans l’entreprise. » Il poursuit : « Le premier changement vise à remettre en cause le rôle de l’État et son monopole de fait. Il faut réaffirmer l’importance de la famille, des religions, des régions, des professions, et leur donner la possibilité d’accompagner pas à pas, au niveau de l’établissement, tout le déroulement de l’éducation et de l’enseignement. L’État définit les normes minimales, offre son contrôle et se substitue aux insuffisances. »
En avril 1971, devant l’Assemblée nationale, Olivier Giscard d’Estaing prévoit « une prolifération des établissements privés » et appelle de ses vœux la « concurrence » « entre public et privé ». Depuis lors on cherche à discréditer le public pour promouvoir le privé sans chercher à identifier l’origine sociale, souvent choisie, de ses élèves ni les distorsions de traitement dont il bénéficie au nom de sa « liberté ».
En juillet 1972 Olivier Guichard cède sa place au Ministère de l’Éducation nationale à Joseph Fontanet poste qu’il occupe jusqu’au 27 mai 1974, René Haby prendra sa suite du 29 mai 1974 au 5 avril 1978. Christian Beullac devient ministre de l’Éducation nationale le 5 avril 1978 jusqu’à l’arrivée d’Alain Savary le 22 mai 1981 pour mettre en œuvre le « Grand Service Unifié Laïque de l’Éducation Nationale » - SPULEN- 90e des 110 propositions de François Mitterrand pour contrer la logique de privatisation en marche depuis 1970. Ce projet est abandonné après la manifestation du 24 juin 1984 qui réclamait , à cor et à cris, « la liberté de l’enseignement », financée par la puissance publique aux dépens de la mixité sociale.
Au-delà des changements de personnes Rue de Grenelle, une même politique continue à se mettre en place depuis 1984 où la puissance publique finance sa propre concurrence et où une omerta politique conforte une collusion d’intérêts entre libéraux et cléricaux pour séparer l’École de l’État et abandonner au profit de réseaux communautaires l’égalité en éducation entre citoyens, projet des bâtisseurs de l’École laïque.
Aujourd’hui encore, il s’agit d’organiser la mise en concurrence des établissements scolaires dans une optique de transfert, au gré des législatures, vers le privé et de concession de service public voire de marchandisation de l’École ?
La question du dualisme scolaire a progressivement quitté le champ religieux pour devenir un enjeu hautement politique clairement défini comme tel.
Qui osera, en cette période de budget contraint, évaluer les surcoûts dispendieux du dualisme scolaire qui obère les finances publiques et pénalise l’ensemble de la population scolaire ?
Qui peut encore prétendre que la guerre scolaire a disparu ?
Continuons résolument à conduire le débat sur les missions du service publique laïque de l’Éducation.
Eddy Khaldi
14 juillet 2022
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