Assez d’homélies à l’eau bénite.
Il faut que le pape admette que la société tout entière et pas seulement les membres les plus lucides de l’Eglise catholique, attend enfin une prise de position à la hauteur de la situation. Nous attendons des actes, et non la poursuite d’homélies à l’eau bénite, pour tenter de franchir la passe dangereuse, où l’institution est engagée.
Tout manquement de ce type doit être dénoncé à la justice du pays où cette agression a été commise.
Si l’Église veut retrouver sa crédibilité et montrer qu’elle est respectueuse des droits imprescriptibles de l’enfant, deux décisions s’imposent tout de suite : le pape doit « accepter », c’est-à-dire susciter un certain nombre de démissions de dignitaires ou de curés coupables ou complices, afin de purger au plus tôt l’Église de ses brebis galeuses, et faire un exemple. Mais il doit simultanément annoncer que dorénavant, sous peine de commettre un péché grave (je me place volontairement dans son registre), tout manquement de ce type doit être dénoncé par qui en a connaissance à la justice du pays où cette agression a été commise. La complaisance qui a prévalu jusqu’ici prend sa source dans cette prétention à s’exonérer de la loi commune, sous prétexte que l’on appartient à l’Eglise catholique. Je ne fais que reprendre ici les demandes des familles des victimes.
"L’on objectera peut-être que le pape n’est pas « maître en Vatican »... "
Il est temps qu’on les entende et qu’on leur rende justice. Je ne fais que redire, aussi, à ma façon, ce que souhaite la fédération de réseaux du Parvis, une quarantaine de groupe de chrétiens progressistes, dont je reproduis le communiqué ci-dessous, transmis par nos amis du CEDEC (Chrétiens pour une Église dégagée de l’école confessionnelle. L’on objectera peut-être que le pape n’est pas « maître en Vatican » et que la Curie majoritairement se refuse à ces mesures de salubrité publique. Alors je le dis tranquillement : si tel est le cas, le pape doit se démettre de sa fonction, comme l’a fait son prédécesseur, Benoît XVI. Il pourrait même aller jusqu’à en donner la raison, afin de provoquer un choc salutaire. En revanche, s’il reste en place, en se contentant des mêmes paroles lénifiantes, il se rend complice des agressions sexuelles commises par des prêtres, en ce moment même dans le monde, et que la connivence de l’institution encourage. Cette affaire gravissime, s’ajoutant à l’intrusion politique de l’épiscopat argentin et du pape, pour faire échouer de peu le droit à l’IVG, que le Parlement s’apprêtait à voter, aura à coup sûr des répercussions graves ; elle pourrait marquer un tournant dans l’histoire de l’Église catholique. La vague de demandes de « débaptisations » en est un premier signe. En tout cas, elle pose cette simple question : de quel droit, avec quelle légitimité, le Vatican peut-il continuer à tenter de prescrire une « morale » et à peser dans les décisions des États démocratiques, dont la France ?
Gérard Delfau
26 août 2018
PS. Au moment où je boucle ce texte, j’apprends que le pape conseille aux parents ayant décelé un penchant à l’homosexualité chez leur enfant de recourir à un psychiatre. Quelle honte d’encourager ainsi les pires préjugés et quelle irresponsabilité pour les dégâts que son propos va causer dans des familles chrétiennes ! Il aurait été mieux inspiré de donner ce conseil aux prêtres pédophiles. Ou mieux d’engager une réforme drastique du célibat des prêtres.