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Les attaques contre la neutralité de l’administration communale se poursuivent dans la région de Bruxelles-Capitale avec cette fois-ci, une motion conjointe CDH-PTB, déposée au conseil communal de Schaerbeek, lundi 14 septembre. Auparavant, c’est le conseil communal de Molenbeek-Saint-Jean qui avait voté, le 31 août dernier, une résolution en faveur du port des signes convictionnels par les agents communaux.
La motion en question était présentée par le tandem PS-SP.a et soutenue par Ecolo (à l’exception de Karim Majoros), le CDH et le PTB. Ce qui se joue dans ces deux communes nous concerne toutes et tous. Car l’effet domino que nous avions anticipé commence déjà à se faire ressentir.
"Invisibiliser" les femmes, "visibiliser" l’islam politique
En effet, notre Collectif Laïcité Yallah qui promeut la citoyenneté avait déjà alerté au sujet de cette possible dérive dans trois tribunes publiées dans La Libre (10 juillet), Le Vif (18 juillet), et Le Soir (8 septembre). Nous avions expliqué, à chaque fois, la fonction politique du voile islamique. Instrument de l’invisibilisation des femmes, il est la pièce maîtresse de la visibilisation de l’islam politique qui prône la fusion entre l’islam et l’Etat. Pour nous, croyants et non croyants, de foi ou de culture musulmane, les dangers de cette normalisation du voile islamique au sein de l’appareil de l’Etat nous paraissent évidents. Les conséquences de cette démarche - si jamais elle aboutit - pourraient être désastreuses, et ce, à plusieurs niveaux. En mettant un terme à l’impartialité de la puissance publique, on fragilise l’Etat, on fracture notre société et on accélère son processus de communautarisation déjà bien avancé. Face à cette stratégie d’entrisme, nous appelons à la vigilance et à la mobilisation pour réaffirmer avec force un principe fondateur de notre démocratie : la séparation des pouvoirs politiques et religieux. Aucune dérogation à ce principe ne peut être accordée. Face à l’urgence de la situation, nous regrettons que les partis politiques ne fassent pas bloc autour d’un tel enjeu non partisan : la neutralité des institutions publiques. Nous saluons, bien entendu, les positions du MR et de DéFI qui vont dans ce sens et invitons l’ensemble des autres formations politiques à s’engager dans la même voie.
Perversion du concept de discrimination
Quelques mots au sujet des discriminations invoquées dans ces deux motions. Les deux textes déposés à Molenbeek et à Schaerbeek font référence aux discriminations que subiraient les femmes voilées dans l’emploi. Curieuse façon de voir les choses. Si les femmes voilées sont discriminées, l’Etat n’en est pas le responsable. C’est, plutôt, une interprétation rigoriste et politique de leur religion qui les place dans une position de subordination aux hommes. Elles doivent se couvrir pour ne pas les provoquer. Pourquoi demander à l’Etat de réparer un tort dont il n’est pas responsable ? Il y a là une parfaite perversion du concept de discrimination. La discrimination suppose que l’on prive quelqu’un d’un droit que l’on accorde à autrui sur une base arbitraire. Dans le cas de figure de la femme voilée, les adversaires de la neutralité exigent qu’on lui reconnaisse un droit qui n’est accordé à personne, à savoir celui de manifester ses convictions religieuses de façon ostentatoire au sein des institutions publiques. Au nom de quoi faudrait-il consentir à lui offrir un tel privilège ? La neutralité demeure le meilleur bouclier contre les discriminations et le prosélytisme. En effet, la neutralité permet aux croyants et aux non croyants de recevoir le même traitement. Les initiateurs de ces deux motions cherchent, en réalité, à obtenir des privilèges en faveur d’une religion pour l’investir de pouvoirs administratifs et politiques. Or, l’Etat ne doit léser aucun citoyen et ne doit en favoriser aucun autre. Soyons clairs : Céder sur ce principe reviendrait à reconnaître la primauté des injonctions religieuses sur la loi civile.
Islamiser l’Etat ou moderniser l’islam ?
Ce n’est pas à l’Etat de s’islamiser mais à l’islam d’admettre la neutralité, autrement dit, de se moderniser. Durant ses heures de travail, un agent de l’Etat (de toute administration) doit s’abstenir d’afficher ses convictions religieuses et politiques. Il n’est ni au service d’un dieu, ni au service d’un parti politique. Pendant l’exercice de ses fonctions, il consent à mettre de côté ses convictions et ses croyances personnelles pour placer l’intérêt général au-dessus de ses intérêts particuliers. L’Etat a une vocation universelle alors que la religion, elle, n’engage que ceux qui y croient. Et si l’évocation de la discrimination n’était qu’un simple prétexte pour comptabiliser davantage de vote. Ne soyons pas naïfs, plusieurs partis se disputent (férocement) ce que d’aucuns qualifient d’"électorat musulman" dont l’importance devient, sans cesse, grandissante dans la région de Bruxelles-Capitale. A l’égard de ceux-ci, nous lançons un avertissement : renoncer à la neutralité de l’Etat nous mènera, tôt ou tard, vers le suicide collectif ! Aucun démocrate ne devrait accepter une telle dérive. La neutralité n’est pas à brader pour des votes.
Elle n’est ni de droite ni de gauche.